C’est la première qui apparaît quand on cherche « femmes – pionnières – Aveyron ». Avant tous les articles de presse, tous les mauvais résultats algorithmiques des moteurs de recherche.
En choisissant d’intituler cette série « Pionnières », et de m’intéresser aux femmes qui ont défriché des chemins en Aveyron, je ne pouvais pas passer à côté d’une Pionnière s’il en est. C’est chez elle que je débute cette série. Parce qu’au-delà de son rôle de premier plan dans l’agriculture aveyronnaise, mon invitée a écrit un livre-témoignage, également baptisé « Pionnières » aux éditions du Rouergue. Cette invitée, c’est Marie-Thérèse Lacombe.
Avant de poser les micros et de lancer l’enregistrement, j’ai rencontré Marie-Thérèse Lacombe trois fois. Je me suis rendue dans sa résidence seniors à Rodez, où elle a récemment déménagé. Elle voulait comprendre le projet, et surtout ne pas confisquer la parole de toutes les femmes qui se sont engagées à ses côtés, ne pas attirer la lumière.
De son engagement, elle n’a rien perdu. Ni les convictions, ni la fougue, à 93 ans. Elle m’a demandé de lui écrire quelques questions, a passé plusieurs semaines à rassembler les souvenirs « pour ne rien oublier », et surtout « que les enchaînements soient dans l’ordre ». Et ce n’est qu’alors que nous nous sommes revus, en présence du photographe Mathieu Lacout.
Son histoire
C’est en rencontrant son époux, Raymond Lacombe, qu’elle arrive en Aveyron. Elle a
une vingtaine d’années. Ils auront quatre enfants. Son époux, lui, aura vécu une vie d’engagements : maire de Camboulazet, il sera président de la Fédération départementale des syndicats d’exploitants agricoles, plus connue sous l’acronyme FDSEA, avant d’en prendre la présidence nationale pendant six ans, à la fin des années 1980. Décédé en 2002, Raymond Lacombe reste une figure nationale et historique du militantisme agricole.
Loin de rester passive à ses côtés, Marie-Thérèse Lacombe bouscule les codes attendus pour les femmes d’agriculteurs à l’aube des années 1960. Elle refuse de voir sa parole confisquée, son rôle cantonné au foyer et s’affranchit fièrement des carcans bien ancrés dans la campagne aveyronnaise. Cette campagne imprégnée et racontée comme étant dominée depuis toujours par le masculin. C’est nier le rôle des femmes dans les fermes quand les maris ont été mobilisés pendant la guerre, c’est nier aussi la place occupée par les femmes dans le quotidien des fermes. Bien que la reconnaissance du statut de « conjointe collaboratrice » ne date que de 1999. Et il faudra attendre 2019 pour que le droit au congés maternité soit voté en France.
Avec et autour de Marie-Thérèse Lacombe, c’est tout un mouvement qui va prendre la parole pour affirmer la place des femmes dans la modernisation des campagnes et du milieu agricole en général.